Dans le cadre de notre rubrique « à proximité », j’ai eu la chance de rencontrer Antoine Papot, social marketing manager chez Ouat, un éditeur de jeu charentais. Il nous parle de l’évolution de son métier et de la place grandissante du jeu dans la relation client des marques. On parle de gamification, et il est possible de la mettre au service d’une nouvelle relation client. Si vous avez besoin, avant de démarrer votre lecture, d’une petite définition, c’est par ici que ça se passe !

 

Antoine, pouvez-vous nous expliquer en quelques mots votre titre ?

Traditionnellement, je suis chargé de l’acquisition et la monétisation de l’audience pour nos jeux.
Mais je développe depuis peu des missions de démarchages, prospection, relation avec les marques pour les intégrer dans nos produits ou leur proposer des jeux sur mesure.

 

Pourquoi ce nouveau rôle ?

D’une part, nos business model évoluent et Ouat a été particulièrement précurseur en la matière avec son jeu Totally Spies. Avant, nous travaillions en BtoC (directement avec le joueur), maintenant nous travaillons en BtoBtoC.
D’autre part, les marques sont à la recherche de nouveaux canaux de communication avec leur client.

 

Pourquoi ?

Leurs clients sont saturés de messages publicitaires. De plus, ils ne sont plus concentrés sur un media précis. Les marques ont donc du mal à les toucher par les media « traditionnels » (TV, presse…). Ils en cherchent de nouveaux. Or, il se trouve que sur un jeu vidéo, le client est obligé d’être concentré, sinon il rate ses objectifs. Le jeu est un moyen de capter l’attention du consommateur.
De plus la socialisation du web et la démocratisation du jeu vidéo poussent aussi à la « gamification » de la relation client. Enfin, ce sont les femmes qui jouent de plus en plus à des jeux « casuals ». Le jeu permet de toucher une population large et variée.

 

Pourquoi utiliser le jeu vidéo dans une marque ?

Non seulement pour recruter de nouveaux clients mais aussi pour les engager, les fidéliser. En quelque sorte, le jeu permet de créer un lien, de l’émotion.

 

Quel est le rôle particulier de Facebook dans cette relation ?

Rodolphe Roux (SEB ) dit qu’« aujourd’hui il faut être en contact avec son client non plus à 360° mais à 365 (jours) » !
Dans le BtoC, Facebook permet de toucher presque 900 millions d’utilisateurs potentiels. C’est un outil primordial pour la relation client. Mais le problème est de proposer du contenu adapté, du contenu qualitatif. On appelle cela du « brand content ». Une des réponses est le jeu vidéo. Or Facebook est devenu une vraie plateforme de jeu : 50% de ses utilisateurs jouent à des jeux vidéos (dont 50% via leur mobile).

 

Quels sont les retours de vos clients face à cette gamification ?

Le problème est de poser les bons indicateurs, qui sont différents des indicateurs traditionnels. Dans ces nouveaux modes de communication, on attire le client vers l’information (marketing pull et non push). On est dans l’engagement, des choses plus compliquées à quantifier que le ROI.
L’indicateur le plus simple à suivre est le nombre de fans. Le vrai challenge est effectivement de proposer des indicateurs pertinents pour les marques. Le danger est de ne chercher que le nombre de fans. Par exemple, les advergames (comme les jeux concours) sont dans cette logique. Cela n’avance pas à grand chose car ce sont des « fans opportunistes » et non qualifiés. La déception est souvent à la hauteur des attentes des entreprises dans ce nouveau canal. Cela peut nuire au développement du marché de ce type de jeu.

Le plus intéressant dans le jeu en ligne est d’avoir des informations en temps réel : nombre de joueurs en ligne… Par exemple La Redoute est très contente de son engagement dans le jeu Totally Spies. Dans ce jeu, les joueurs pouvaient habiller les personnages avec de vrais articles du catalogue la Redoute. Les ventes ont été corrélées au nombre de clics sur le jeu.

On travaille aussi sur des notions comme le taux de mémorisation de la marque dans un jeu vidéo.

 

Comment voyez-vous l’avenir ?

La tendance à la gamification de la relation client est bien installée. C’est très mature aux États-Unis. En France, les entreprises commencent à s’emparer de la technique (Française des Jeux par exemple). De son coté, Ouat s’y est préparé et a créé le département « Ouat brand Gamification », spécialisé dans le conseil et le jeu social pour les marques. Je pense que la gamification est une nouvelle forme de contact avec le client pour les marques car dans une économie de l’attention dispersée, fragmentée, il permet de capter l’attention du consommateur.
Et pour avoir une vision encore plus futuriste, la prochaine étape est la « fiction totale »  avec des déclinaisons d’un jeu entre les différent supports :  web, tv, réseau social et mobile. Pour aller encore plus loin dans l’expérience !

Antoine, merci pour ce partage !